Chaque jour, des millions de personnes lisent leur Horoscope du jour, à la recherche d’un indice, d’un miroir, ou d’un mot juste pour accompagner l’instant. Ce rituel, devenu presque banal, est en réalité l’héritier d’une tradition ancienne, savante, mystique… et parfois oubliée.
Avant les colonnes de magazine, avant les apps, l’astrologie était un art sacré. Et dans la France du XVIIIe siècle, un certain Jean-Baptiste Alliette, alias Étteilla, a tenté de lui redonner une voix à travers les cartes.
L’horoscope : un héritage vieux de plus de 3000 ans
Le mot « Horoscope” vient du grec hōroskopos, « observateur de l’heure”.
Mais bien avant les Grecs, les Babyloniens, dès le IIe millénaire avant notre ère, consignaientsur des tablettes les mouvements des étoiles et des planètes, en les reliant à la vie des rois et des empires. Ils pratiquaient une astrologie mondiale, réservée aux grands événements.
Ce sont les Grecs hellénistiques qui vont transformer ces savoirs en une astrologie individuelle : avec le Zodiaque, les maisons, les Aspects planétaires, la Carte du ciel de naissance.
Au fil des siècles :
- Les romains diffusent le système,
- Les arabes le perfectionnent,
- Et l’Occident médiéval l’intègre à la médecine, la théologie, la politique.
Au XVIe siècle, tous les grands savants, de Kepler à Nostradamus, pratiquent l’astrologie. L’horoscope devient une lecture du ciel à un moment donné, appliquée à une personne donnée.
Mais c’est avec la presse populaire du XXe siècle que l’horoscope généralisé, basé uniquement sur le signe solaire, voit le jour.
Étteilla : un ésotériste entre ciel et cartes
Né en 1738 à Paris, Jean-Baptiste Alliette, mieux connu sous le pseudonyme Étteilla (anagramme de son nom), fut l’un des premiers à concevoir un jeu de Tarot entièrement dédié à la divination.
En 1783, il publie Le Zodiaque mystérieux ou les oracles d’Étteilla, où il explique sa méthode de lecture du Tarot en lien direct avec les astres, les éléments, les humeurs, les correspondances alchimiques.
Puis il publie le célèbre Livre de Thot, un tarot entièrement remanié, où :
- Les 22 arcanes majeurs changent de noms, de numérotation,
- Les cartes 1 à 12 sont explicitement liées aux signes du zodiaque (lire l’article à ce sujet)
- Chaque carte possède une valeur divinatoire directe, souvent marquée sur la carte.
Étteilla n’était pas un astrologue au sens classique. Mais il a cherché à créer un pont entre les influences célestes et la lecture intuitive des cartes.
Astrologie et tarot : un mariage alchimique
Chez Étteilla, le zodiaque n’est pas un décor : il est intégré à la mécanique même du tirage.
Contrairement à l’astrologie traditionnelle, qui nécessite des calculs complexes (natalité, aspects, maisons…), Étteilla propose une astrologie incarnée, accessible, symbolique :
- Un tirage du jour peut être lu à la lumière du signe zodiacal du moment.
- Une carte zodiacale (par exemple « Ève” pour le Scorpion) peut résonner avec les transits astrologiques.
- Les lames deviennent des miroirs du ciel, traduits en scènes humaines.
Ce n’est donc pas un horoscope, mais une lecture astrologique du tarot, précurseur de ce que certaines pratiques modernes tentent à nouveau de réconcilier aujourd’hui.
L’horoscope moderne : un dérivé simplifié… voire édulcoré
L’horoscope que nous lisons aujourd’hui dans un journal, sur une app ou une plateforme en ligne repose presque toujours sur un seul critère : votre signe solaire.
C’est-à-dire : la position du Soleil au moment de votre naissance. Rien de plus.
Ce qu’il ignore :
- Votre Ascendant, pourtant essentiel pour comprendre la manière dont vous vous exprimez dans le monde.
- La position de la Lune, qui gouverne l’émotionnel, les besoins intérieurs, les réflexes inconscients.
- Les transits du jour appliqués à votre Thème natal : par exemple, que fait Saturne actuellement pour VOUS ?
- Les aspects personnels entre vos planètes natales et celles du moment (Trigone, Carré, Opposition…).
En résumé, l’horoscope du jour grand public propose une lecture générale, valable pour 1/12e de la population.
C’est un aperçu global, souvent symbolique, qui peut faire sens… ou non. Il ne tient pas compte de votre unicité astrologique.
Étteilla, lui, visait autre chose
Là où l’horoscope médiatique tend à standardiser, Étteilla cherchait à individualiser.
Ses cartes, pensées pour la divination, sont sensibles au moment, au contexte, et à l’Intuition du consultant.
Il ne prétendait pas “prévoir l’avenir” avec exactitude, mais lire un climat subtil, parfois en résonance avec les mouvements célestes.
Tirer une carte du Grand Étteilla, c’est demander au symbole ce qu’il a à dire ici et maintenant, sans avoir besoin de connaître l’angle exact de Mercure.
En cela, le tarot d’Étteilla ne remplace pas l’astrologie, mais il en incarne l’intention : faire parler le ciel à l’échelle humaine.
Conclusion : relier les mondes
L’horoscope a parcouru un long chemin : des temples mésopotamiens à nos flux TikTok. Mais son essence n’a pas changé : trouver du sens dans le mouvement du ciel.
Étteilla, en osant mêler cartes et constellations, a ouvert une voie : celle d’un langage symbolique entre ciel et terre.
Aujourd’hui, lire son horoscope peut être un point de départ. Tirer une carte, c’est peut-être aller plus loin.